Sais-tu quelle est la part du trafic automobile dans les émissions de CO2 en Suisse? 40%. Il est donc tout à fait logique que les débats sur la protection du climat incluent aussi la mobilité: en Suisse et dans l’UE, un objectif climatique renforcé s’applique à partir de 2020: les nouveaux véhicules devront émettre au maximum 95 grammes de CO2 par kilomètre, contre 130 grammes autorisés aujourd’hui. Il est donc grand temps d’agir et de rechercher des solutions innovantes. L’électromobilité semble être une voie prometteuse à cet égard.
Plus ancienne que les voitures Ă essence
Aujourd’hui, l’électromobilité est célébrée comme une idée moderne. Mais ses origines remontent plus loin. Dès les années 1830, des véhicules électriques ont été conçus en Europe et en Amérique: triporteurs, calèches, véhicules ferroviaires et enfin voitures à la fin du siècle. Le naturaliste britannique Michael Faraday en fut le précurseur: grâce à l’électromagnétisme, il a découvert qu’on pouvait produire une rotation continue. L’électromobilité est ainsi plus ancienne que le moteur à combustion.
De l’abondance des matières premières aux considérations environnementales
L’apogée de l’électromobilité a pris fin lorsque l’ingénieur américain Charles F. Kettering a découvert en 1911 un système d’allumage électrique pour les moteurs à combustion. En outre, l’autonomie des voitures à essence était plus importante et le pétrole, moins cher, était disponible en abondance. Avec la production à la chaîne des voitures propulsées par l’énergie fossile, la production des voitures électriques a donc quasiment été mise à l’arrêt dans les années 1920.
Ce n’est qu’avec la crise pétrolière des années 1990 et la prise de conscience écologique de plus en plus marquée que l’électromobilité a retrouvé le devant de la scène. Ce n’est toutefois pas l’aspect de la durabilité mais plutôt l’argument financier qui devrait faire pencher la balance en faveur de la transformation de fond actuelle de l’industrie automobile: des amendes s’appliquent aux nouveaux véhicules qui émettront à l’avenir plus de 95 grammes deCO2par kilomètre. Rien que pour l’année prochaine, l’association de la branche auto-suisse table sur des amendes pouvant atteindre 300 millions de francs.
Un marché en plein essor
Entre-temps, la quasi-totalité des principaux constructeurs a annoncé se concentrer davantage sur les véhicules électriques ou hybrides. Actuellement, 1.3 million de véhicules électriques sont en circulation dans le monde. La Chine constitue le marché le plus important et à la croissance la plus rapide: c’est non seulement là que la plupart des véhicules électriques sont fabriqués mais aussi qu’ils sont vendus. La Norvège rejoint aussi le haut du tableau: au premier semestre 2019, sept nouvelles immatriculations sur dix concernaient des véhicules électriques ou hybrides, surtout en raison des avantages fiscaux offerts par le pays. À partir de 2025, les pays nordiques veulent même interdire les nouveaux véhicules essence et diesel. Les États-Unis, l’Allemagne et la France constituent d’autres marchés importants de l’électromobilité. La Suisse se retrouve loin derrière: si 6’000 véhicules électriques ont été immatriculés au premier semestre (un nombre bien supérieur à celui des années précédentes), la part de marché totale ne se situe actuellement qu’à 3,8%.
De nombreux avantages
Outre des émissions nulles deCO2, l’électromobilité présente d’autres facettes positives. Tout d’abord, elle permet d’éliminer les nuisances olfactives et sonores, ce qui améliore la qualité de vie générale, en particulier en ville. Ensuite, l’électricité est sensiblement moins chère que l’essence ou le diesel. Lors des descentes, la récupération permet même de produire de la nouvelle énergie. Enfin, les moteurs n’ont guère besoin d’entretien car ils n’ont pas de pièces d’usure comme les courroies.
Que signifie «durable»?
Cependant, il est judicieux de porter un regard plus attentif à certains de ces paramètres. Ce n’est pas parce qu’un véhicule dégage 0% d’émissions qu’il est pour autant durable. Tout dépend en effet du mode de production de l’électricité (p. ex. charbon vs force hydraulique) avec lequel la voiture est fabriquée et chargée.
En ce qui concerne le traitement des batteries usagées, la technologie progresse en revanche à grands pas, comme le confirme Andrea Vezzini, chercheur en électrotechnique à la Haute école spécialisée de Berne:«Aujourd’hui, 92% des batteries sont recyclables. La technologie est là . Or personne ne construit pour l’heure d’installation de recyclage car toutes les batteries se trouvent encore dans les véhicules.»Des critiques demeurent pour les matières premières nécessaires à la fabrication comme le cuivre, le nickel, l’aluminium, le cobalt ou le manganèse, souvent extraits dans des conditions non durables, voire parfois problématiques. Les fabricants doivent faire mieux sur ce point.
La question de l’autonomie
Au quotidien, les Suisses expriment encore souvent des craintes quant à l’électromobilité: les réserves les plus courantes concernent l’autonomie des véhicules ainsi que le réseau insuffisant de bornes de recharge. Il est évident que personne n’a envie de rester en rade, batterie vide, en rase campagne. Cette peur est toutefois infondée: les fabricants vantent une autonomie pouvant aller jusqu’à 600 kilomètres pour les nouveaux modèles. «En réalité, cette valeur peut varier de 20% selon la conduite et le trajet», explique Viktor Wyler, responsable de la flotte de Mobility. L’autonomie ne serait donc plus un problème. «En particulier en Suisse, où il est rare que les trajets fassent plusieurs centaines de kilomètres», affirme V. Wyler.
En ce qui concerne l’infrastructure de charge, il est vrai que notre pays a encore beaucoup de progrès à faire. Mais il y a là aussi de bonnes nouvelles, comme l’indique l’expert en électrotechnique Andrea Vezzini: la Confédération compte multiplier les bornes de recharge rapide sur les aires de repos.«Elles seront construites dans les deux prochaines années et permettront de charger jusqu’à 100 à 150 kilomètres d’énergie en seulement 20 minutes.»
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